La Ciboule se défoule

Alphonse armé d’une bêche, d’un râteau et d’un cordeau se fait taquin,

Il m’envoie avec quelques sœurs rejoindre le carré retenu pour les Mille couleurs.

Son épouse Agathe y plante mes lointaines cousines, les futures reines de son jardin :

Freesias, jacinthes et lys mêleront aux miennes leurs entêtantes senteurs.

De son espièglerie sa moitié est fâchée ; elle le tient pour « gamin »

Dépité, il lui tourne le dos « pas commode la Dame » siffle le plaisantin.

Vite, vite, il sème mes petites sœurs dans les sillons appropriés ;

Ses attentions feront de nous d’exquises denrées vivement appréciées.

Subtile Cébette, je craque la surface brune en une timide touche de vert ;

Dans cette terre riche de rosées, je deviendrai dodue à souhait.

Mes panaches de feuilles allongées font fuir la méchante vipère,

Mes boules neigeuses et gracieuses offrent à Agathe leur frileuse beauté.

Alphonse me déloge pour un gîte plus confortable à l’abri des froidures.

Je peux me faire belle en attendant le prochain printemps et ses giboulées.

Les beaux jours arrivent, la terre se réchauffe, c’est le réveil de la Nature ;

Dame Agathe revient au jardin pour nous cueillir et garnir son garde-manger.

Alphonse sème mes cousins lors des printanières ondées ;

Rosés de Roscoff et Dorés de Parme, venez prendre ma place.

Toi Le Rouge, tu enrichiras leurs mets de tes saveurs pleines d’audace.

Toi Le Jaune, tu sublimeras leurs soupes de fêtards en fin de soirée.

Compagnons de leurs tables depuis des lustres,

Quand ils nous préparent, à chaudes larmes Ils pleurent.

Du débutant hésitant au génial chef illustre

Tous nous adoptent, nous exploitent et vénèrent.

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Comme quoi l'oignon a beaucoup de choses à nous raconter...