Silence, je me souviens

De ma maison ensoleillée, j’écoutais le silence. Celui que j’avais réclamé à cors et à cris durant des années.

Il avait fallu une terrible colère de la nature pour l’entendre.

De mes fenêtres, j’admirai les mésanges voleter de branches en branches en toute liberté, sans être dérangées par les voitures ou les motos tonitruantes.

Elles déportaient les graines du printemps revenu, pour faire le travail dont l’humanité envahissante commençait à les priver.

Et moi, je jouais la fourmi. J’avais l’impression de ne jamais m’arrêter : une activité en poussait une autre.

Surtout, je me retrouvais dans ce calme ambiant. Finalement la privation de sortie ne touchait que ma propension à désobéir et en cela je ressemblais aux autres.

Je pensais à mes parents qui avaient vécu une période apocalyptique, la deuxième guerre mondiale et je me posais des questions sur ces fameuses capacités d’adaptation et de résistance à une situation exceptionnelle. Il me semblait que le danger propagé par les humains était bien supérieur que celui répandu par un virus que de toute façon, les hommes allaient maitriser.

Et si ce n’avait été toutes ces vies reprises, j’aurais pu apprécier cette situation.

Je me contentais de me retrancher dans le silence bienfaisant qui était tombé sur nous et je me rapprochais de cette jeune fille idéaliste et rêveuse disparue l’année de ses dix neuf ans que j’avais été.

Celle-là, à la moindre occasion depuis quatre ans, venait se promener dans mon sommeil et mes réflexions.

Et surtout, elle était silencieuse, elle vivait au calme de sa famille.

Je savais que cette époque avait disparu à tout jamais et le silence, propice à la nostalgie me renvoyait en écho des souvenirs enfouis.

Une vie, pour moi, est une succession de vies : on passe d’une vie à l’autre par cataclysmes successifs mais pourquoi mon esprit naufragé revenait-il toujours à cette année-là ?

Seul mon cœur secret le sait …

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[REGARD Elisabeth]

année de référence au bien-être de vivre